Un si gentil pharmacien…

Otto Carius Combat Mission

Il y a quelques mois encore, à quelques dizaines de kilomètres de la frontière française, il était encore possible de vous faire servir un tube de Paracétamol ou un remède miracle à vos hémorroïdes persistantes par un vieillard chenu, chétif, voire malingre. Ce petit homme d’aspect débonnaire, probablement aussi peu avare de bons conseils que n’importe quel autre pharmacien moyennement zélé, pouvait être trouvé derrière le comptoir de la Tiger Apotheke, une officine de province peu remarquable installée dans une bâtisse tout aussi dépourvue du moindre charme.

Hier comme aujourd’hui, il y a en vérité peu de chances que vous gariez un jour votre voiture le long de la Hauptstraße qui traverse le village de Herschweiler-Pettersheim et que vous grimpiez les huit marches qui conduisent à la porte de la Tiger Apotheke. Pratiquement aucune, à moins bien sûr que vous ne possédiez un pied à terre là-bas, ou que vos douleurs anales se réveillent subitement dès que vous vous égarez sur les routes secondaires plutôt que suivre de façon classique l’autoroute pour Francfort. Mais même si ç’avait été le cas, vous n’auriez probablement conservé aucun souvenir remarquable de votre passage à l’officine, sinon une pensée fugace pour cette pauvre Allemagne qui laisse ses vieillards suer jusqu’à l’hiver de leurs existences. Et pourtant…pourtant…

…Vous auriez pourtant rencontré un homme qui avait le sang de ses innombrables victimes sur les mains.

otto Carius 2Pas de ces assassins du dimanche, de ceux qui passent malencontreusement à l’acte la troisième fois que leur épouse se plante devant l’écran de télévision pendant une finale de Ligue des Champions. Pas de ces Serial Killers ordinaires, dont le palmarès atteint parfois à peine l’effectif d’une classe de maternelle. Pas de ces tueurs un peu pervers, qui ne seraient en comparaison que des tueurs de chatons en banlieue chic. Non ; un Tueur de masse, froid et calculateur, tel que le cimetière de son village ne suffirait sûrement pas à accueillir toutes ses victimes.

Toutefois, de manière opportune, l’assassin qui rassasie goulûment son appétit de crime en temps de guerre gagne les galons de Héros de la Patrie. Ainsi, notre bon M. Otto Carius a pu jouir et exhiber en toute liberté sa Croix de Chevalier de la Croix de fer avec feuilles de chêne, de même que toutes les autres décorations dont il a été couvert, jusqu’au 24 janvier 2015, date à laquelle il a rendu son dernier soupir et les clefs de sa pharmacie.

Crédité de la destruction de plus de 150 chars ennemis, le palmarès de cet As tankiste l’aurait autorisé – s’il en avait eu l’occasion- à toiser Michael Wittmann d’un regard condescendant en lui tirant l’oreille avec affection. Si ce chiffre donne le tournis et hisse Otto Carius parmi les trois meilleurs tankistes allemands de la Seconde Guerre Mondiale, il faut tout de même souligner que le score fût principalement acquis aux commandes d’un Tigre I, dont l’excellence et la létalité entre 1942 et 1945 sont substantiellement supérieures à celles d’une Fiat Punto.

Otto CariusOn fait de bons ouvriers avec de bons outils. La chose permet de relativiser l’Aura dont bénéficient les meilleurs tankistes allemands (on a déjà évoqué à deux reprises celle de Wittmann, dans « Les Reflets de Villers-Bocage » puis dans « Wittmann à Villers-Bocage »), pratiquement tous dotés du même engin.

Otto Carius servit près de trois ans et demi sur le Front de l’Est et ne rendit les Armes à l’Ouest qu’en avril 1945, alors commandant d’une unité de Jagdtiger. Parmi ses faits d’armes, dont il fait le récit dans son livre « Tiger im Schlamm » (Les Tigres dans la boue), on se souviendra de la Bataille de Malinava, le 22 juillet 1944, qui dans sa physionomie fait un peu figure de Villers-Bocage du Front de l’Est. Deux concepteurs de scénarios pour Combat Mission s’y sont intéressés…

Dernier ajout – Carius at Malinava en version française pour Combat Mission : Red Thunder, flanqué de sa notice historique (en V.O.) au format Pdf.

L’excellent « George MC » McEwan, concepteur de scénarios émérite, s’est cette fois associé à Charlie Meconis pour vous permettre de revivre le haut fait d’armes d’un As allemand sur le Front de l’Est. Remarquons qu’après « Wittmann’s Demise » et « Wittmann wins the Swords at Villers-Bocage » pour Battle for Normandy, George MC peut désormais, avec cette nouvelle réalisation, difficilement nier une certaine appétence personnelle pour les « épopées » historiques impliquant des As allemands.

Mais aussi, pour Black Sea – On vous l’a peut-être déjà soufflé à l’oreille : certaines cartes de Batailles Rapides livrées avec Combat Mission : Black Sea sont des adaptations -qui confinent au copier/coller- de cartes précédemment disponibles dans Combat Mission : Red Thunder. Monsieur Stagler, qui n’aime probablement pas les verres à moitié plein, a repéré 85 cartes de Red Thunder qui n’avaient pas leurs équivalents dans Black Sea. Et tout naturellement, il a entrepris de les convertir aussi. Le résultat est un pack téléchargeable (à extraire dans […]black Sea /games files/quick battle maps) que vous trouverez dans l’un de ses dossiers Dropbox.

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8 Responses to Un si gentil pharmacien…

  1. Li-An dit :

    Rappelons que le gag est de Maester – et c’est très vilain d’utiliser des images sans crédit, particulièrement lorsqu’elles sont protégées par le droit d’auteur. Ça serait ballot de voir le site se faire fermer d’autorité par OVH suite à une plainte d’ayants-droits.

    Et le gag est moyennement futé puisqu’il faut évidemment retirer la protection métallique pour que ça risque d’effervescer.

  2. STEELPANTHER25 dit :

    Li-An a bien raison de faire ce rappel qui vaut pour tous même en dehors de cmfr … ensuite quand à décrire le « pharmacien » comme un assassin, là je pense qu’il faille aussi faire preuve de « modération » ; ) dans tes propos : )

  3. Carlos dit :

    Rappelons que le gag est de Maester – et c’est très vilain d’utiliser des images sans crédit, particulièrement lorsqu’elles sont protégées par le droit d’auteur. Ça serait ballot de voir le site se faire fermer d’autorité par OVH suite à une plainte d’ayants-droits.

    Je t’imagine tout particulièrement sensible à la question, dans la mesure où tu es toi-même du métier.:)
    Mea Culpa. Il s’agit effectivement d’un dessin de Sœur Marie-Thérèse des Batignolles de Maëster, qui a droit à son tréma en guise d’excuse. J’avoue que eut égard à la popularité de ce personnage de BD, je n’ai pas songé une seule seconde qu’il puisse y avoir doute ou confusion. Ce n’est donc même pas un oubli, c’est une négligence, dont on trouvera sûrement d’autres exemples dans le site. Je tâcherai d’être vigilant…surtout lorsqu’il est question de bande-dessinée… 😀

    ensuite quand à décrire le « pharmacien » comme un assassin, là je pense qu’il faille aussi faire preuve de « modération » ; ) dans tes propos : )

    Je suis tout à fait prêt à acquiescer devant ceux qui trouveraient le billet mal fichu, pas drôle, en somme pas bon du tout. Que ceux qui ont cette opinion ne se gênent du reste pas pour me le signaler. Si c’est le cas, la conséquence probable serait que ce billet ne serait pas lu au degré auquel j’ai souhaité le placer, produisant, au final, un malentendu.
    Non, Otto Carius n’a en réalité pas à être qualifié d’assassin, évidemment…pas plus que je pense que le lectorat de CM.fr a tendance à développer des hémorroïdes douloureuses, ou qu’il est seulement malencontreux de garrotter sa femme durant un match de Ligue des Champions (Un peu de bon sens: c’est quand même pas la Coupe du Monde merde !)

    Comme d’autres billets, celui-ci raconte une petite histoire qui se veut rigolote et dans laquelle je cherche à ménager un « effet »…en bundle la chose peut parfois ouvrir sur une ou deux méditations à deux balles. Encore une fois, il est fort possible que pour le coup je me sois vautré et que le truc ne mérite pas d’être publié. Là n’est pas la question. Je souhaite juste que vous donniez crédit au fait que c’était bien là l’intention.

    Dans ce billet-ci, je me ressers d’un « pitch » mille fois servit au cinéma ou la littérature. Celui qui brode sur un personnage d’apparence innocente et respectable, un humble vieillard ou un enfant candide de préférence, qui se révèle avoir un lourd secret, un passé terrible et affreux.

    C’est là la première idée en kit qui m’est venue en consultant la biographie d’Otto Carius et en parcourant le site dédié à sa pharmacie. Ce tout petit bonhomme tiendrait à merveille le rôle du vieillard au sinistre passé. Et puis, après tout, il existe un contraste bien réel entre cet homme qui mène une vie d’une banalité sans nom en 2015, et cet incroyable passé que son apparence et son métier ne laissent pas soupconner. Qui irait imaginer ? J’aurais très bien pu pousser la porte de sa pharmacie et repartir sans savoir. Dans les deux cas, celui de ma petite histoire et celui de la réalité, il y a donc bien un « voile », deux facettes, un « secret ».

    L’effet que mon billet tente de produire est ménagé par le fait que je ne nomme évidemment pas le personnage dans la première partie. On ne sait pas qui il est. Je le décris, j’insiste sur sa banalité, de manière à ce que la phrase « …Vous auriez pourtant rencontré un Assassin » écarquille immédiatement les yeux du lecteur. Je paragraphe suivant se veut comme un « roulement de tambour » où après avoir mis en avant le « banal », je déplie « l’incroyable et terrible »…sans encore dire de qui il s’agit ! (notez que ce n’est pas un hasard si la photographie militaire d’Otto Carius est en fin de billet).
    Tout cela pour insister sur le fait qu’il ne faut trop prendre au sérieux ces billets, ce serait faire un contresens (contresens dont je veux bien porter la culpabilité quand le billet n’est pas bien fichu).

    En matière de sujets de réflexion à deux balles, j’ai voulu pour le coup en faire infuser deux. Le premier pour rappeler combien les personnes âgées ont la profondeur que leur confère une longue existence. On n’arrive que difficilement à se départir du raisonnement (enfantin) qu’un vieux n’est qu’un vieux et que quelque part, c’est comme s’il l’avait toujours été : insignifiant, inapte, expert en radotages et sécrétions salivaires. L’exemple d’Otto Carius, dont la trajectoire est à bien des égards étonnante, nous rappelle que chacun traverse le temps, et tisse sa vie de mille fils. Chacun est riche d’une histoire particulière qui, dans le cas de Carius mais aussi dans beaucoup d’autres, croise la Grande.
    Le second sujet tient dans « Toutefois, de manière opportune, l’assassin qui rassasie goulûment son appétit de crime en temps de guerre gagne les galons de Héros de la Patrie. ». Voilà évidemment une idée à la portée d’un gamin de 6 ans. Autrement dit : « la guerre c’est pas bien parce que ça tue des gens ». Oui, bon. J’ai bien conscience que je ne serai pas lauréat du Nobel pour celle là, mais tant pis ; c’est vrai que la guerre c’est pas bien 😀

    En résumé, je n’enlèverai donc pas le qualificatif « Assassin » du billet car si je le faisais, je m’accorderais à l’idée que le texte doit être pris au sérieux. Carius n’est pas un assassin mais le petit homme inquiétant de mon billet, oui.

    • Sarazin dit :

      T’es con.
      Respecte les bons combattants contre le bolchevisme.

      • STEELPANTHER25 dit :

        Je ne te remercie pas d’avoir exhumé ce billet par ce que j’ai du m’y remettre à 2 fois pour le relire et … n’avoir toujours pas compris le 3° degré de Carlos, ni le … pourquoi de mes réponses !

        Ceci dit les éditions Caraktère (Batailles et Blindés, …) sortent le bouquin de Carius traduit en Français pour une somme somme toute modique.

  4. STEELPANTHER25 dit :

    Disons que « tueur » ne m’aurait pas gêné … bon, comme tu le dis, c’est pas la Coupe du Monde non plus, « Aux chiottes l’OM » pendant qu’on y est ! …

  5. Carlos dit :

    Disons que « tueur » ne m’aurait pas gêné …

    Un militaire tue avec préméditation. Hors circonstance de guerre, ce serait donc qualifié d’assassinat. 😀
    (ce qui est marrant, c’est que ce serait aussi de la légitime défense -encore qu’avec un canon de 88, on pourrait discuter du caractère proportionné de la riposte)

    Mais encore une fois, si « Assassin » t’a gêné et « tueur » t’aurait convenu, c’est très sûrement parce que le billet ne rend pas évident que « tout est pour rigoulay ». A ce titre, il y aurait donc faute de ma part.

  6. STEELPANTHER25 dit :

    Un militaire exécute une mission … quand au côté « rigolo », on te connait, et celui qui prend ce billet au 1° degré devrait changer de crémerie … on peut rigoler de tout mais pas avec n’importe qui me diras-tu, mais j’avoue que je me serais plus marré si à la place « d’assassin » il y avait « tueur » …

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